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Les regards d'homme : Être un “bon homme” en tant que photographe : héritages invisibles et injonctions silencieuses

Dernière mise à jour : il y a 4 jours


Le visuel des regards d'homme une série de Yes Photographies
Les yeux du photographe Yohann Elhadad de Yes Photographies

🌿 Regards d’homme – Une série pour interroger le regard, le corps, l’image

Ce texte est le premier d’une série d’articles que j’ai intitulée “Regards d’homme”. C’est une démarche personnelle, artistique et humaine pour questionner ma place de photographe — et d’homme — dans la manière dont je regarde, je photographie, je crée des images du féminin.

Car ces derniers temps, le monde change. Les regards aussi.Le mouvement MeToo, les œuvres qui bousculent comme The Substance, les prises de parole sur le male gaze, les rapports de pouvoir invisibles… tout cela me touche profondément.

Et plutôt que fuir ces questions, je choisis de les accueillir, de les explorer avec honnêteté. Non pas pour juger ou culpabiliser, mais pour comprendre ce qui, parfois à mon insu, peut encore façonner mes images. Et comment je peux m’en libérer.

Dans cette même dynamique, je suis aussi en train de mener une étude qualitative auprès de femmes photographiées, sous forme de questionnaire empathique. Leurs paroles viendront nourrir cette série d’articles à suivre, pour croiser les regards et faire émerger une compréhension plus fine, plus partagée, de la relation photographique.


Mon histoire personnelle paradoxale

Je suis né dans une époque étrange. Trop jeune pour avoir vécu Mai 68, mais assez vieux pour en avoir ressenti les secousses. Adolescent dans les années 80, j’ai grandi entre deux mondes : celui d’une libération sexuelle déjà fantasmée par nos parents, et celui d’une peur nouvelle — sourde, froide — qui s’appelait le Sida.

Dans les salles obscures, je découvrais des films comme Les Valseuses, où la nudité, le désir, l’insolence, l’irrévérence éclataient à l’écran comme des appels à vivre librement. Mais dans nos vies de jeunes hommes, quelque chose coinçait déjà. La peur. La culpabilité. L’injonction d’être "bien". Et surtout… d’être un bon homme.

Une image d'enfance entouré de mes soeurs

Une éducation féminine et silencieusement normative

J’ai été élevé dans un univers très féminin : des sœurs, des cousines, des femmes fortes, sensibles, aimantes — et exigeantes.Être un bon homme, dans ce contexte, c’était ne pas faire de vagues. Ne pas être comme “les autres”, ceux qu’on pointait du doigt. Être compréhensif, doux, jamais intrusif. Ne pas désirer trop fort.

On ne me l’a pas dit en ces mots. C’était plus subtil. Ça passait dans les regards, dans les silences, dans les compliments réservés aux garçons bien élevés. Et moi, j’ai voulu être celui-là. Même si, au fond, quelque chose en moi se rebellait déjà.


Une peinture de mon père Daniel Elhadad

Mon père, lui, était peintre.

Dans sa jeunesse, il dessinait, il créait, il rêvait de liberté. Puis il est devenu père… et il a fait ce qu’il pensait être juste. Il a tout rangé.Ses pinceaux. Ses toiles. Ses rêves.

Il est devenu assureur. Je n’invente rien.

Il a assumé. Il a “assuré”. Mais il ne m’a jamais dit "fais de l’art". Il m’a dit, en actes :

"N’en fais pas. Tu vas crever de faim."Et dans ses soupirs plus que dans ses mots :"Fais mieux que moi. Même si ce que tu fais est nul."

Les regards d'homme : Être un “bon homme” en tant que photographe : héritages invisibles et injonctions silencieuses : Double héritage. Double enfermement.

  • Du côté des femmes : sois gentil, sois lisse, sois irréprochable.

  • Du côté des hommes : ne sois pas artiste, ne sois pas rêveur, ne rate pas ta vie.

Alors que faire, quand on a un cœur d’adolescent coincé dans un corps d’adulte bien élevé ? Quand on regarde le monde à travers un objectif, et qu’on sent que ce regard est à la fois hérité, traversé, et profondément désirant ?


Ce que je questionne ici n’est pas seulement une posture artistique.

C’est un pacte inconscient, une histoire de loyautés invisibles. Des injonctions qui se nichent dans mes gestes, dans mes choix de lumière, dans mes cadrages, dans mes silences aussi.

En tant qu’homme.En tant qu’artiste.En tant que photographe du féminin.

Et aujourd’hui, je commence à me demander :

Que veut dire être un “bon homme”,si cela revient à sacrifier ce qui, en moi, est vivant, vibrant, libre — et parfois dérangeant ?

Et puis il y a ce mot, ce drôle de mot : bonhomme.


Le bon homme c'est pas un vrai bonhomme !

Un jour, j’ai tilté : un bon homme, c’est censé être un bonhomme.

Tu sais, le vrai mec, celui qui en impose, qui serre les dents, qui protège, qui ne pleure pas.

Quand on te dit : "Toi, t’es un vrai bonhomme", c’est rarement pour saluer ta sensibilité ou ta finesse d’âme…

C’est pour dire que t’as encaissé. Que t’as fermé ta gueule.

Alors je me demande : est-ce qu’on peut être un “bon homme” sans devenir un “bonhomme” au sens viril, dur, verrouillé ?


Et si l’homme de demain n’était ni gentil ni dur, mais simplement entier ? Ce billet est le premier d’une série.Elle ne vise pas à donner des réponses.Elle vise à poser les bonnes questions. Celles qui font trembler, et qui font avancer.


Restez à l'écoute pour les articles à suivre !


Yohann Elhadad - auteur de l'article : Les regards d'homme Être un “bon homme” en tant que photographe : héritages invisibles et injonctions silencieuses.

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